LE MAROC

Khenifra: Géographie
Khenifra: Histoire

Au Maroc, la région de Khénifra constitue un atout stratégique, qui permettra de contrôler les portes de Tadla et de Taza, malgré la résistance ardue de sa population. Deux édifices marquent principalement l'histoire de Khénifra:
* la casbah de Mouha, édifiée par le sultan Ibu Tachfin sur le bord d'Oum Errabiaa, restaurée par le sultan Moulay Ismaïl en 1688, dans le cadre de la construction de l'axe stratégique Mekhnès-Marrakech.
* la casbah d'Adakhssal le pont sur l'Oum Errabiaa dit « pont portugais », construits très certainement à la même époque que la Casbah de Khénifra.
D'un point de vue historique, la présence des portuguais n'a jamais vraiment été mentionnée dans des écrits de l'époque.
L'histoire de Khénifra est intimement liée à ces deux monuments historiques (patrimoine national du Maroc). La Casbah de Mouha (ou Hammou Zayani) et le pont portugais marquent la conscience des Khnifris où le présent et le passé s'entremêlent dans la conscience de ses générations. Ce pont est toujours là malgré les nombreuses crues qu'il a subi. Une légende s'est forgée autour du vieux pont : on croit qu'il est bâti avec des œufs (selon la tradition orale).
La ville de Khénifra, a été prise par des légionnaires sous les ordres de Richard d'Ivry en 1914 durant sa campagne du Maroc.
En référence au « Journal des marches et opérations de la 2e batterie du 1er Régiment d'Artillerie de Montagne (1912-1913) », le commandement des forces d'occupation du Maroc était conscient des risques de l'affrontement directe avec les tribus des Zayanes lors de la campagne du Maroc 1907-1914. Dans ce rapport, Ch. Mangin décrit avec précision les différentes phases de sa stratégie au Maroc. Une riposte aura lieu à Elhri, le 13 novembre: la bataille d'Elhri, engagée imprudemment par le colonel Duverdier à l'assaut du campement du rebelle Mouha ou Hammou, contraint de quitter la casbah, occupée par les militaires. On note également les manifestations contre le Dahir berbère, promulgué le 16 mai 1930, dont le but était de séparer les berbères des communautés arabes.
Avant l'arrivée des soldats du sultan Moulay Hassan Ier en 1877, Khénifra n'était rien d’autre qu’un point de transition de transhumance entre l'Azaghar et le Jbel. C’est à partir de là que Khénifra prendra toute sa dimension de ville. Malheureusement, Khénifra ne s'est pas développée, pendant la colonisation, à la hauteur de ses potentialités naturelles (elle fait partie du Maroc dit inutile). Elle est connue pour sa résistance farouche lors de la colonisation française, réputée par la bataille d'Elhri (village situé à 20 km de Khénifra) (13 novembre 1914), qui s'est soldée par la victoire des Zayanes et d'autres tribus berbères voisines : Ichkirn Elkbab, Ait Ihnd Krouchen, même des Ait Hdiddou et des Ait Atta, pour la première fois unifiées. Cette victoire symbolise la gloire des tribus et le grand prestige que s'est forgé Mouha ou Hammou Zayani où la colonne de l'officier Duverdier fut presque entierement anéantie, mais la riposte ne tarda pas afin d'isoler les Zayanes et restreindre leur aire géographique et les obliger à se réfugier dans les montagnes. Le blocus des tribus Zayanes se réalisa avec succès, le grenier marocain de Tadla est ensuite mis en sécurité contre les attaques des Zayanes. Le 2 juin 1920, le Pacha Hassan se soumet au Général Poeymirau (1869-1924), très proche collaborateur du maréchal français Lyautey.
Khenifra est également connue pour ses soulèvements et ses événements :
* 20 août 1955 : l'anniversaire de la déposition du roi Mohammed Ben Youssef provoque une insurrection à Khénifra (3 journalistes assassinés), Oued Zem, Immozer Maroucha, ait alahem(Aderj) ainsi qu'à Casablanca. Événement marqué par une répression massive sur ordre du Général Gilbert Grandval, journée sanglante pour la population de Khénifra surtout les tibus Zayanes qui encerclèrent la ville, l'ordre du massacre fut ordonné, la ville de Oued Zem n'a pas été épargnée par l'exaction du tyran qui trouva la mort dans les montagnes de Khénifra le 22 août 1955 lors de l'explosion de son avion. On chiffe à 700 les morts côté Marocain et à 49 côté européen (chiffres que Ch.A.Julien qualifie de ridicule).
* Mars 1973 : événement de Moulay Bouazza. Action perpétrée par le Tanzim, branche dissidente du parti l'UNFP d'orientation révolutionnaire, dont l'acteur principal fut Fquih Basri, partisan de la lutte rebelle armée. Des éléments du groupe s'infiltrent à Khénifra, Goulmima, et Tineghir.
* Le 2 mars 1973, une action suicidaire fut entreprise à Moulay Bouazza, par Mohamoud, mort ensuite le 5 mars 1973 lors des combats. Cette action fut un fiasco, la population n'y avait pas pris part. Elle restera néanmoins traumatisée par la répression de certaines tribus Zayanes. Après la décrispation politique et dans le cadre de l'Instance équité et réconciliation, le rideau fut levé et permis aux victimes de témoigner, mettant fin aux années de fer au Maroc.
* août 1994 : Grande manifestation contre le Dahir berbère soutenu par certains caïds ayant à leur tête le Pacha El Glaoui, le pacha Hassan Amahzoune et des intellectuels hostiles aux berbères. Ce mouvement de protestation lancé par l'élite bourgeoise Fassi issue de l'enseignement traditionnel prendra la tête de la résistance jusqu'à l'indépendance en 1956. Cependant, la question Amazigh ne cesse d'engendrer des polémiques. Conscient du problème, le roi Hassan II avait proposé dans son discours du 20 août 1994, l'enseignement de la langue berbère au Maroc. Ce geste marquait le point départ d'une certaine décongestion politique envers les Amazighes.
* Le 17 octobre 2001, le discours d'Ajdir du roi Mohammed VI à Khénifra, lors de la cérémonie d'apposition du Sceau chérifien scellant le dahir, crée et organise l'Institut royal de la culture amazighe. Ce discours a permis de donner de nouvelles impulsions aux défenseurs de la thèse Amazigh en tant qu'entité nationale et patrimoine incontournable du Maroc.