Figuig
est parmi les plus anciennes oasis de la frange septentrionale
du Sahara. Site habité depuis les temps préhistoriques,
ce qui a été appelé pendant plusieurs
siècles le pays de Figuig recèle des trésors
qui restent à découvrir.
Figuig
est composée de 7 qsour(1) : El-Maîz, El-Hammam
Foukani, El-Hammam Tahtani, Laabidate, Loudaghir, Ouled Slimane,
et Zenaga.
Ces qsour
sont tous reliés entre eux par l’extension récente
de l’espace bâti, sinon par les jardins de la palmeraie
étendue sur environ 650 ha.
Relais
stratégique sur les anciens axes du commerce caravanier
transsaharien et sur l’axe sub-saharien Est-Ouest, le rayonnement
culturel, scientifique et économique de l’oasis dépassait
même l’échelle régionale. Cette richesse
des échanges se manifeste notamment dans l’architecture
locale qui a largement inspiré les voyageurs : Zenaga
est comparée au vieux Marrakech alors que les ogives
de Loudaghir ont rappelé à l’administration
française les bourgades médiévales européennes,
enfin, le qsar El-Hammam Foukani a souvent surpris par ses
maisons à étages, aussi ingénieuses que
l’ancien habitat de l’antique Rhodes.
Le patrimoine
culturel actuellement conservé porte surtout le cachet
de la période islamique. Des maisons et des mosquées
séculaires construites en terre séchée
côtoient le célèbre minaret octogonal
pierreux de l’époque mérinide. De même
les vestiges d’anciens qsour et hameaux désertés
ou détruits par les guerres subsistent encore tout
comme les mausolées et les bibliothèques des
marabouts et des savants dont les documents manuscrits ont
largement été pillés (on les retrouve
dans les mains de particuliers ou dans de grands musées
comme celui de Berlin par exemple).
L’habitat
de Figuig se caractérise par son ancienneté
et son originalité. Le qsar (aghrem en tamazight) est
une cité entourée d’une enceinte de protection
et de tours de contrôles.
Chaque
aghrem possède un centre autour de la Jemaa (administration)
où se concentrent les lieux d’apprentissage (écoles,
zaouias), la Mosquée ou les mosquées, les commerces.
Autour de ce point central, les quartiers sont divisés
en lignages et en familles. Chaque aghrem est également
doté de bains, de lavoirs et d’une ou plusieurs sources
d’alimentation en eau potable. Enfin, pour des raisons de
climat et d’espace, les ruelles sont couvertes, elles sont
disposées de façon à briser le vent,
climatiser, aérer et augmenter la surface habitable.
La cité
se fermait la nuit par une ou des portes et toute entrée
ou sortie était étroitement surveillée.
En effet, l’insécurité régnait et de
nombreux conflits ont opposé aussi bien les différents
qsour entre eux que les qsouriens et les nomades. A l’extérieur
immédiat du qsar se trouvait généralement
la grande station de transit (tachraft) où se posaient
les caravanes de commerçants, les cimetières
et les palmeraies.
La maison
traditionnelle est constituée d’un grand nombre de
pièces disposées autour d’une cour centrale
appelée saray (patio) qui servait à la fois
d’espace de travail et de point d’éclairage et d’aération.
Cette cour est encadrée de préaux ouverts par
des colonnes et arcades. Les maisons ont habituellement un
étage, voire deux, toujours une terrasse et abritent
hommes et bêtes.
Les matériaux
utilisés sont locaux : la terre, la pierre mais aussi
l’argile (blanche, rouge et verte), la chaux, la cendre, le
bois de palmier, de laurier-rose et de certains arbres fruitiers.
Les pierres ne sont utilisées en général
qu’à la base des murs pour les protéger des
dangers des eaux ruisselantes et des oueds en crue. Le reste
de la maison est monté en briques de terre cuites au
soleil. Les plafonds sont constitués d’ensouples tirées
des troncs de palmiers et des palmes ou tiges de lauriers-roses.
Les escaliers
sont en bois de palmier et en plaquettes de pierre (grès).
Le bois est peint avec de l’argile rouge pour le protéger
et les murs sont toujours badigeonnés de chaux pour
la même raison.
Au cours
des trois dernières décennies, l’habitat traditionnel
a connu une véritable mutation. Figuig n’a pas échappé
au phénomène oasien de sortie du qsar avec l’augmentation
démographique et les transformations du mode de vie.
Aujourd’hui, en l’absence de politique nationale de protection
des sites historiques, Figuig se trouve devant un véritable
choix de société, laisser le temps faire son
œuvre de destruction ou éviter à ce riche patrimoine
architectural de disparaître sans laisser de traces. |